En 1812, le préfet Jourdan déplora l’absence de toute académie ou société savante dans le Département des Forêts, l’ancien duché de Luxembourg annexé par la France révolutionnaire. De 1815 à 1839, le Luxembourg promu au rang de “ grand-duché ” — comprenant alors les actuels Grand-Duché et Province belge du Luxembourg — a été administrativement intégré dans le royaume des Pays-Bas au roi duquel il avait été confié à titre personnel par le congrès de Vienne. Pour être tout à fait correct, il faut préciser que de 1830 à 1839 le Grand-Duché était en très grande partie rattaché au nouveau royaume belge. Seule la capitale et ses environs immédiats à portée des canons de la garnison prussienne de la ville Luxembourg, qui avait le statut d’une forteresse de la fédération allemande, était encore sous administration hollandaise.

Se sentant tout à fait partie intégrante du Royaume des Pays-Bas respectivement de la Belgique, les rares Luxembourgeois qui au cours de ces premières décennies du 19e siècle s’intéressaient aux sciences se tournaient tout naturellement vers l’“étranger” (terme qui, bien entendu, n’a ce sens que de notre point de vue actuel).

Ainsi, les premiers articles de botanique écrits par des Luxembourgeois (Marchand, Tinant) paraissent à Amsterdam, en néerlandais, dans les “Bijdragen tot de Natuurkundige Wetenschappen” publiés par van Hall, Vrolik et Mulders.

Les Luxembourgeois étaient de même membres des sociétés savantes “étrangères”. L’un d’entre eux, l’avocat Gaspard-Théodore-Ignace de la Fontaine (1787-1871), député, gouverneur de Luxembourg de 1841 à 1848, était même membre correspondant de l’Académie de Bruxelles à laquelle il avait été admise le 23 décembre 1822 (Neyen 1876).

Déjà en 1798 une “ société de lecture ” animée au début par l’abbé D.C. Munchen avait été fondée à Diekirch; elle avait survécu à l’occupation française (Herr 1985). En 1818 est fondée à Luxembourg une “ Société littéraire ”, en 1821 y apparaît une “ Société d’art dramatique ”. Un “ Cercle littéraire ”, dont le directeur-président est G.-Th.-I. de la Fontaine, s’y établit en 1826 (Goedert 1987, Grégoire 1981). En juillet 1826, un “ Comité philhellénique ” se constitue sur instigation notamment de l’abbé Maeysz qui en devient aussi le président. Culturel seulement sur les bords, le rôle de ce comité consiste surtout à lever des fonds pour soutenir le peuple grec dans sa lutte pour l’indépendance (Goedert 1987, Sprunck 1951).

Une première société scientifique luxembourgeoise s’est constituée sous l’impulsion de médecins civils et militaires de la ville de Luxembourg qui, en juillet 1832, décidèrent de fonder une société pour la propagation des sciences médicales, chirurgicales et de l’histoire naturelle. Elle prit le nom de “ Medizinisch-Chirurgische und Naturforschende Gesellschaft für das Grossherzogtum Luxemburg ”; ses statuts furent approuvés par les autorités le 30 octobre 1832. Nous ignorons quasi tout des membres et de l’activité de cette société qui semble avoir été éphémère.

L’indépendance politique à laquelle le Grand-Duché (amputé du territoire de l’actuelle province belge) accéda en 1839, le contraignait également à une plus grande indépendance intellectuelle. Le début fut fait dans le domaine des sciences humaines avec la fondation en 1845 de la “ Société pour la recherche et la conservation des monuments historiques ”, communément appelée “ Société archéologique ”. Puis, ce fut en 1850 au tour des sciences naturelles de se donner des structures plus organisées.